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Médicament anti obésité, le produit de l’année

    Qu’est-ce qui est bleu, européen, et qui est désormais plus riche que LVMH ? Réponse : la compagnie pharmaceutique Novo Nordisk, depuis qu’elle commercialise son médicament anti-obésité aux USA. Et c’est très sérieux.
    Oui oui, vous lisez bien. Plus riche que LVMH. Première fortune d’Europe. En quelques mois, Novo Nordisk a détrôné l’industrie du luxe à la Bourse. Elle commercialise aux USA 1 médicament nouvellement mis sur le marché pour traiter l’obésité: Wegovy. Il s’agit d’une hormone à s’injecter une fois par semaine – le semaglutide, pour diminuer ses sensations de faim. Ou plutôt pour ressentir la satiété. (En Europe, le médicament n’est pas encore autorisé. Il commence à être prescrit dans des hôpitaux aux Royaume Uni).

    Et ça marche. Oui, scientifiquement, sur des études de grandes cohortes(+3000 personnes), ce médicament fonctionne et fait perdre 10 à 15% de leur poids, aux personnes qui prennent ce médicament sur 68 semaines (+1 an). J’ai bien lu et regardé ces études cliniques, et franchement il n’y a rien à dire. Environ 3000 personnes à l’IMC >30 ont suivi ce traitement sur plus d’un an. 1000 personnes ont reçu un placebo. Tous les individus ayant participé à cette étude (médicament ou placebo) ont également du faire du sport régulier 100 à 200 minutes par semaine, manger beaucoup moins 1200 à 1800 kcal par jour, et suivre des groupes de thérapie comportementale. 

    -15kg en 1 an en moyenne

    Et le résultat est sans appel. Le sémaglutide a permis aux personnes atteintes d’obésité de perdre 10 à 15% de leur poids (-15Kg en moyenne), alors que le personnes sous placebo ont perdu 2% de leurs poids (-3kg en moyenne). Et cerise sur le gateau (mais on s’en doutait), ce médicament fait également baisser le risque de maladies cardiovasculaires de 20%. 
    (On s’en doutait puisque le fait de perdre 10% de son poids lorsque l’on est en surpoids, fait automatiquement baisser le risque de maladies cardiovasculaires.) 

    Alors quoi ? C’est la fin ?  Vous savez, depuis que je suis journaliste médical, -début des années 2000 – j’ai toujours suivi avec intérêt cette recherche absolue de l’industrie pharmaceutique pour trouver enfin LE médicament anti obésité. 

    Partout dans les congrès médicaux, c’était le saint graal à enfin trouver. Le surpoids et l’obésité étant deux fléaux des sociétés modernes que l’industrie   Pharma n’arrivait absolument pas à toucher.  C’est chose faite. Après plein d’essais plus ou moins catastrophiques (dont un médicament affreux qui faisait tout passer par les selles … my god). Alors non, ce n’est pas la fin, c’est d’ailleurs plutôt le début. Ce qu’il faut enfin et pour toujours comprendre : c’est que l’obésité est une maladie complexe. Qui n’est pas uniquement un problème d’entrée et de sortie de calories. 

    C’est devenu trop dur aujourd’hui, de bouger plus et manger moins

    Et comme toute maladie complexe et chronique, les solutions sont complexes, variées et longues. Dire à quelqu’un qui est atteint d’obésité, qu’il suffit de « manger moins et de bouger plus », c’est comme de dire à un dépressif de « sourire à la vie » ou à un alcoolique de « boire moins ». Oui la balance énergétique a son rôle à jouer (différence entre calories ingérées et dépensées). Oui il n’y a pas de miracle dans la prise et la perte de poids. Mais aujourd’hui, dans notre monde :  réussir à obtenir ce déficit calorique (dépenser plus de calories que l’on en mange) sur le long terme est très difficile. 

    C’est très dur de bouger plus et manger moins. Nos cerveaux (notre psyché) joue contre nous. L’environnement joue contre nous. Nos amis, notre famille, et souvent toute la vie autour jouent contre nous. Donc beaucoup de personnes vont avoir besoin d’une aide complexe, diverse, variée, pour pouvoir réussir à obtenir ce déficit calorique sur le très long terme. 
    Pour certaines personnes il faudra de la thérapie comportementale, et ça suffira. Pour d’autres une thérapie, plus du coaching sport et alimentaire. Pour d’autres une thérapie, du sport et de l’alimentation, et un médicament anti-obésité. Pour d’autres une thérapie, du sport et de l’alimentation, un médicament et une chirurgie bariatrique … 

    C’est pour cela qu’une comparaison avec l’alcoolisme et la dépression n’est pas idiote. Ce n’est pas qu’une question de volonté. Les thérapies pour ces maladies sont diverses, variées et évaluées au cas par cas. Parfois médicamenteuses, parfois comportementales, parfois un peu des deux ou encore autre chose… 

    Un traitement anti-obésité à prendre … à vie !

    Bref, autant vous dire que l’on n’est pas au bout de nos peines avec cette maladie coûteuse (en dépenses de santé) mais surtout en mal-être des individus. Mais c’est quand même une bonne nouvelle pour les patients et pour les médecins. L’industrie pharma bosse dur, et quand ça marche, il faut le dire. Et puis c’est cool aussi que le continent européen soit encore avant-gardiste et au chevet de nos amis les yankees ! En Europe, on n’a pas trop de pétrole, mais on a encore et toujours de grandes idées. 
    Seul bémol, mais vous vous en doutiez … Le sémaglutide doit être pris à vie, si l’on veut voir les résultats perdurer. Et oui !! C’est ça, la grande réussite de Novo Nordisk et c’est bien cela aussi, que les labos pharmaceutiques recherchent !! Un bon médicament qui se prend à vie. 

    Car dès lors que les patients ont arrêté leur traitement, le poids revient en 1 à 5 ans. Aussi, n’oublions pas la prévention contre cette maladie toujours plus coûteuse. Parce que le vrai fond du problème, ce n’est pas l’obésité. C’est comment la société pousse encore et toujours plus les individus à devenir obèses. C’est une construction du monde qui n’a même pas 100 ans. Alors vraiment, on ne sait plus comment vous le dire mais aujourd’hui encore et plus que tout : soignons nos cerveaux, notre psyché, nos amis, nos familles, nos environnements, nos vies !! Avant qu’il ne soit trop tard. 

    25 commentaires sur “Médicament anti obésité, le produit de l’année”

    1. Bonjour,
      merci pour cet article très équilibré.

      Une de mes proches est engagée dans un processus de perte de poids, à partir d’une situation d’obésité importante. Elle est suivie de très près, et, sous le pilotage d’une équipe médicale, utilise tous les moyens existants : anneau bariatrique, travail sur l’alimentation et l’image corporelle, travail sur les raisons profondes de son obésité (en dehors de facteurs biologiques), kiné, sport, … et médicament (je ne sais pas si c’est celui-ci ou un autre) pour accélérer la prise de poids.
      Elle fait preuve d’une détermination et d’une intelligence remarquable, mais il me semble important de témoigner du « coût » – financier, mais aussi en fatigue, et effets secondaires- d’une perte de poids continue (en plus d’une énorme perte de poids suite à la pose de l’anneau, elle perd 3kg par mois depuis plus de 18 mois – ça n’a l’air de rien, mais c’est épuisant).
      C’est vraiment important de souligner, comme vous le faites, que ces médicaments n’ont rien de « miraculeux ». La rapidité de la prise de poids l’a je pense aidée à maintenir sa motivation, ce qui est énorme – mais le moins qu’on puisse dire est que ce n’est pas une « solution de facilité ». Cela demande un travail énorme – dont la part la plus exigence est peut-être la plus invisible  : le travail psychique d’adaptation à un corps qui change encore plus vite qu’à l’adolescence (le sport aide…).

    2. Bonjour

      Je suis psychologue dans un réseau de chirurgie bariatrique et ce médicament est prescrit à certains patients dans un cadre de suivi médical.
      Tous les patients n’y adhèrent pas et essaie de faire du sport et manger sainement
      Les personnes en obésité morbide décident de se faire opérer le plus souvent car trop de souffrances physiques et psychiques
      Il y a tellement à dire à réfléchir sur ce sujet l’obésité étant liée à une histoire, à des traumas, des régimes à répétition, à la génétique….
      Merci de nous donner à réfléchir
      Bonne journée

    3. Le semaglutide est le fameux Ozempic, médicament de traitement du diabète de type 2 détourné par les filles des réseaux sociaux pour perdre du poids de façon spectaculaire. Le problème est qu’on n’arrive plus à fournir pour les patients diabétiques du fait du détournement de ce médicament.
      Vraie bonne nouvelle? Pas sûr

    4. Merci pour cet article, super intéressant.
      En effet je trouve que la société se crée un problème (le surpoids, l’obésité) avec les industries de la malbouffe mondialisées, et ensuite, au lieu de « supprimer » la cause du problème, on trouve de nouveau une « solution » industrielle – et chère.
      Un peu déprimant, tout ça…. (mais je suis facilement déprimée, tkt 🙂

    5. « Tous les individus ayant participé à cette étude (médicament ou placebo) ont également du faire du sport régulier 100 à 200 minutes par semaine, manger beaucoup moins 1200 à 1800 kcal par jour, et suivre des groupes de thérapie comportementale. »
      Et le groupe placebo n’aurait perdu en moyenne que 2% de son poids, soit 3 kilos en moyenne, sur plus d’1 an ?
      Pas très motivant pour bien manger/faire du sport….

    6. Mais en fait je ne comprends pas, il « suffit » de prendre un médicament qui donne un sentiment de satiété pour perdre du poids? Pourquoi ce qui a le plus d’impact c’est réguler la satiété? Ca veut dire qu’on n’arrive pas à la réguler en temps normal?

    7. Bonjour Lucile !
      je m’appelle Léonie et je répondis sur cette lettre très intéressante mais qui manque selon mon point de vue d’étudiante en pharmacie d’un peu de précisions.
      Le Semaglutide existe déjà en France, il a obtenu son autorisation de mise sur le marché pour les diabétiques. C’est un inhibiteur de la DPP IV , et ce médicament est pris par les diabétiques de type 2. Actuellement en France on se bat contre 1 chose : la falsification d’ordonnance. En effet, nos jeunes concitoyens français ont entendu parler de ce médicament qui fait maigrir, et a l’approche de l’été, beaucoup de personnes ont essayé d’obtenir ce médicament alors que leur corpulence était correcte ou alors un petit chouille au dessas de « la norme ». Le risque ? que les patients diabétiques n’aient pas accès à leur traitement. Je pense que vous voyez le risque de ce médicament et de l’information donnée ici.
      Bonne journée et bonne continuation,
      Therin Léonie.

    8. On croise les doigts pour que ça marche … mais quid pour le coût … quid pour les abus… et quid pour les dommages collatéraux sur la santé en général… attendons un peu , mais ça va ds le bon sens pour aider les obèses!

    9. Bonjour Lucile ! Alors en France il existe et c’est d’ailleurs au centre de l’obésité près de chez moi à La Seyne-sur-Mer qu’il a été étudié ! Et je suis préparatrice en pharmacie j’en délivre déjà sur prescription mais pour le moment il n’est pas remboursé. D’ailleurs nous délivrons le Victoza®️, qui coute « que » 80€ à la charge du patient car pas l’AMM pour cette indication (seulement pour les patients atteints de diabète).

    10. bravo pour cet article très bien fait. j ai aussi lu l étude sur le semaglutide et vous en faites un très bon résumé accessible à tous.

    11. bonjour
      Comme toujours j adore votre article
      Effectivement les problèmes de sur poids ou d’obésité on des origines et des raisons différentes d un individu à l autres
      beaucoup de pathologie oblige la prise de médicaments vie
      y a t il des effets indésirable à la prise de ce médoc ?
      merci pour vos articles
      bonne journée

    12. Bonjour Lucie,

      Merci pour ton article très intéressant.

      J’avais envie en lisant votre article de vous partager mon expérience face à ce médicament.

      Mes parents obèses tous les deux sont sous traitement depuis environ 2 ans maintenant.
      La première phase était comme écrit “révolutionnaire”. Ils ont réduit très fortement les quantités pendant les 6 premiers mois et les kilos ont commencé à s’envoler gentiment.
      Malheureusement, ils se sont accoutumés au dosage et ont dû augmenter la prescription pour avoir un effet identique et garder les bienfaits et résultats des débuts .

      Après de nouveaux 6 mois, rebelote. Accoutumance et augmentation de la dose.

      Aujourd’hui, ils sont arrivés au dosage maximum et l’effet du médicament n’est plus.

      Ils remangent en grande quantité.

      J’ai aussi constaté que ce médicament ne soignent pas ce que je pense être une partie du fond du problème.

      L’obésité s’accompagne généralement de mal bouffe. En effet, mes parents ont toujours mangé très très mal (gras sucré) et n’ont du coup, pas changé leurs habitudes.
      Ils avaient réduit les quantités mais ont continué de manger gras et sucré.

      Ajouté à la quantité, c’est redevenu, assez catastrophique.

      Alors ils continuent de prendre ce médicament malgré tout pour avoir un minimum de contrôle, mais à l’heure actuelle les résultats ne sont plus là. 😕

      De part cet échec, je crois que nous ne sommes pas encore arrivé à trouver le vrai miracle qui fonctionne pour tout le monde, sur le long terme en tout cas.

      Voilà je voulais partager ma petite expérience pour pondérer un peu l’effet « miraculeux » de ce médicament.

      Sûrement il y a une explication à cette échec. Peut être doivent ils prendre une autre molécule qui leur serait plus bénéfique ?
      J’espère que des progrès vont encore se faire pour arriver à les soigner. C’est une maladie qui reste encore très complexe et je crois que nous avons besoin de faire encore des progrès.

      Très belle journée à vous.

      Bien cordialement

      Cindy

    13. et pour une grosse partie mettre en place un déficit calorique , du sport, un accompagnement ne suffira tt simplement .
      quand on a des soucis de santé , on de thyroïde, pb hormonal et tt plein d autres pathologies , le médicament il le faut . pas forcément celui là ms , il en faut d’autre.
      Tt stigmatiser sur l alimentation et le poids , on le sait maintenant par a+b pour une partie ça ne s applique pas.
      et lire ce genre de discours est culpabilisant pour ses personnes, il faut le nuancer et ds ce cas , bcp de personnes seront on avec ça pke qq part c est vrai.

    14. Merci pour cet article intéressant !
      Est-ce que le poids revient parce que les gens mangent « trop » ou parce que le médicament dérègle tout à l’intérieur ?

    15. Bonjour Lucile
      Merci pour cet article hyper intéressant. Alors oui l’obésité est une maladie, pour certains hormonale, pour d’autres comportementale…mais c’est surtout un fléau personnel pour ceux qui en souffrent et aussi sociétal car très en lien avec notre mode de vie. Personnellement je suis l’excellent de ma famille en étant mince: sûrement une question de métabolisme mais aussi un refus du fatalisme familial. Pourquoi devrions-nous être grosses à partir de 16 ans alors que nous étions fines enfants ???
      Une chose est sûre : c’est une heureuse découverte pour les malades mais il faut aussi poursuivre la prévention. Dans tous les cas merci pour cette lecture

    16. Bonjour Lucile,
      Je me permets de rebondir sur ton article qui me touche très personnellement. En France, un médicament, NovoNordisk également, est déjà disponible, le liraglutide ou Saxenda.
      Il a la même action à savoir déclencher la sensation de satiété ce qui permet de réduire la prise alimentaire.
      Je n’etais pas obèse mais en surpoids complexe et très honnêtement ce médicament est en train de changer ma vie.
      Je voudrais juste témoigner du fait que c’est loin d’être une solution de facilité, ce médicament doit s’accompagner d’une prise en charge globale pour être efficace. Le sport, le bien manger sont au cœur de cette prise en charge mais aussi un travail mental pour justement éviter la reprise après l’arrêt du médicament.

    17. Bonjour Lucille

      Merci pour ce partage très intéressant. Infirmiere de profession, j’ai été hallucinée de réaliser des soins à une patiente qui s’était fait posée un ballonet (option temporaire de la sleeve). Operation purement esthetique car la dame n’avait que 10 à 15 kg grand max à perdre DANS SA TÊTE!!!! CAR PAS EN OBÉSITÉ.
      Avec comme clou du spectacle, une ordonnance (sans nom, et donc partageable !!!) pour des injections de type insuline, protocole sur pls mois après l’ablation du ballon. Donc, oui, ça arrive en France. Tristement.

      Esther

    18. Effrayant … 😧
      Inquiétant….
      Saisissant …
      Je trouve que cela rejoint vraiment l’audio « mental fort » du LWEC.
      Les gens n’arrivent plus à décider par eux même… et ont besoin d’être guidés sur et pour tout (moi souvent la première 😝 en tout cas pour la motivation sportive).
      Sujet qui mérite qu’on s’y penche et qui fait réfléchir. Merci pour cet article Lucile 👏

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